Les crocodiles du désert / The crocodiles of the desert

Le Sahara est le plus grand désert du monde. Etendue de roches et de sable, il avance inexorablement. Il était, voilà 110 millions d'années, le territoire du plus grand crocodile de tous les temps : le Sarcosuchus imperator.

Crocodilien longirostre du crétacé inférieur, il mesurait plus de 11 mètres pour un poids de 4 tonnes environ. Son crâne a lui seul atteignait 1,80 mètres. Prédateur des petits dinosaures, il se nourrissait également de poissons, tels les coelacanthes. C'est sur ses traces que je suis allé, avec une équipe de la Ferme aux crocodiles, dans le cadre d'un projet de reconstitution de ce reptile hors normes. Partant d'Agadez au Niger, nous avons traversé le Ténéré pour rejoindre Gadoufaoua, où Philippe Taquet, alors jeune paléonthologue du Muséum d'histoire naturelle de Paris, avait été appelé en 1964, par des géologues du commissariat à l'énergie atomique à la recherche d'uranium. Ils se trouvaient face à d'impressionnants ossements. A la suite de cette découverte, Philippe Taquet et France de Lapparent ont identifié et baptisé le Sarcosuchus imperator en 1966.
Face à ce désert balayé par les vents de sable, qui s'étire à perte de vue, comment s'imaginer qu'à l'époque il y avait des fleuves, beaucoup de végétation et une atmosphère humide. Avec la complicité de notre guide et de Sébastien Stayer, paléontologue, nous trouvons de nombreux ossements, vertèbres, dents, témoins de la présence du crocodile géant, non loin d'un cimetière de dinosaures, dont certains ont pu être ses contemporains.
C'est à partir des mensurations du squelette actuellement présenté au Muséum d'histoire naturelle de Paris, que le travail de reconstitution, confié à Manu Jansens et son équipe de la société Ophys, a pu  s'effectuer, sous contrôle des deux inventeurs. Ce spécimen, plus vrai que nature, est aujourd'hui présenté à la Ferme aux crocodiles de Pierrelatte.
Le Sahara n'est plus ce territoire accueillant et luxuriant qu'a connu le Sarcosuchus imperator. Le désert avance et les crocodiles qui le peuplent disparaissent peu à peu. Déjà, ils se sont éteints en Algérie et au Maroc, où ils vivaient dans la vallée du Drâa, depuis plusieurs décennies.
Aujourd'hui ils survivent dans quelques gueltas de Mauritanie où je suis allé les rencontrer, avec l'équipe de la Ferme aux crocodiles. Nous avons pris la route de l'espoir vers le Mali pour arriver dans le village de Tamchakett, où le maire nous a expliqué que c'étaient les militaires français qui, en creusant pour construire un fort, avaient mis à jour une mare, très vite investie par les crocodiles. Ils sont aujourd'hui protégés par les villageois.
Puis nous avons traversé le Tagant, pour rejoindre la Guelta de Matmata. Après une longue marche depuis le camp de base, nous sommes arrivés tôt le matin en surplomb de la guelta qui se deversait dans un oued. Nous avons pu compter sept crocodiles, très farouches. Aucun ne dépassait 2,50 mètres.
Lors de ce voyage, un matin, alors que le camp de base se réveillait à peine, je découvrais, avec surprise et bonheur, à travers mes jumelles un crocodile sur un rocher de la rive opposée, nous faisant face. Ce paysage me replongeait dans le souvenirs des oueds de mon enfance marocaine. Il serait dommage que ces groupes de crocodiliens encore présents finissent par déserter totalement le Sahara. Cette pensée fait résonner à mes oreilles cette phrase du sage burkinabais : "quand il n'y aura plus de crocodiles, il n'y aura plus d'eau".


The crocodiles of the desert 


Sahara is the biggest desert of the world. Expanse of rocks and sand, it advances inexorably. It was, 110 million years ago, the territory of the biggest crocodile of every time : Sarcosuchus imperator. Crocodilian longirostre of the lower Cretaceous, it was more than 11 meters for a 4 ton weight approximately; the skull  was 1,80 meters long. Predator of the small dinosaurs, it also eat fishes, such coelacanths. It is on its tracks that I went, with a team of the Farm of crocodiles, within the project of reconstruction of this reptile except standards.
From Agadez in Niger, we crossed Ténéré to join Gadoufaoua, where Philippe Taquet, then young paléonthologue of the Natural history museum of Paris, had been called in 1964, by geologists of the Atomic Energy Commission in search of uranium. They were in front of impressive bones. Following this discovery, Philippe Taquet and France de Lapparent identified and baptized Sarcosuchus imperator in 1966.
In front of this desert swept by the winds of sand, which stretches as far as the eye can see, how imagine it use to be rivers, a lot of vegetation and a wet atmosphere. With the complicity of our guide and Sébastien Stayer, paleontologist, we find numerous bones, vertebras, teeth, witnesses of the presence of the huge crocodile, not far from a cemetery of dinosaurs, among which some were able to be its contemporaries.
From the measurements of the skeleton presented in the Natural history museum of Paris, that the work of reconstruction, confided to Manu Jansens and his team of the company Ophys, was able to be made, under control of both inventors. This specimen, is presented to the Farm in the crocodiles of Pierrelatte.
Sahara is not any more this welcoming and luxuriant territory which knew Sarcosuchus imperator. The desert moves and the crocodiles which populate it disappear little by little. Already, they went out in Algeria and in Morocco, where they lived in the valley of Drâa, for several decades. Today they survive in some gueltas of Mauritania where I went to meet them, with the team of the Farm in crocodiles.
We set off the hope road towards Mali to arrive in the village of Tamchakett, where the mayor explained us that it was the French servicemen, that by digging to build a fort who had updated a puddle, very fast invested by crocodiles. Today, they are protected by the villagers.
Then we crossed Tagant, to join Matmata's guelta. After a long walking since the base camp, we arrived early in the morning in overhang of the guelta. We were able to count seven crocodiles, very wild. None exceeded 2,50 meters.
During this journey, a morning, while the base camp woke up hardly, I discovered through my binoculars, with surprise and happiness, a crocodile on a rock of the opposite bank, facing us. This landscape dipped back to me in memories of the oued of my Moroccan childhood. It would be a pity if these groups leave desert totally Sahara. It makes me thing of this  sentence of an wise person burkinabais: "when there will not be crocodiles anymore, there will not be water anymore".